mardi 26 août 2025

Knivet

Un des auteurs les plus tardifs du seizième siècle à avoir écrit sur le Brésil est le voyageur anglais Anthony Knivet, qui n’a d’ailleurs publié le récit de ses aventures qu’au début du siècle suivant. Je n’avais encore jamais lu son livre, dont le texte original n’est pas facile à trouver, et j’ai emprunté récemment la version française publiée en 2003 chez Chandeigne sous le titre Un aventurier anglais au Brésil : Les tribulations d’Anthony Knivet (1591). Ce gentilhomme participait à une expédition du corsaire Thomas Cavendish, dont l’activité principale consistait à razzier les installations portugaises sur la côte brésilienne. Ayant été abandonné par ses compatriotes, notre homme vécut alternativement parmi les Indiens et parmi les Portugais, souvent maltraité, toujours en danger. Son livre m’a fait penser à celui d’Ulrich Schmidel, de par la violence quasi incessante et omniprésente. L’histoire se déroule pendant la période «conradienne», la période incertaine des premiers temps de la présence européenne, pendant laquelle le sort des arrivants n’était jamais assuré, et se produisaient toutes sortes de massacres : non seulement d’Indiens par les Blancs mais aussi de Blancs par les Indiens, et comme toujours d’Indiens entre eux et de Blancs entre eux. Le récit abonde en épisodes non conformes aux légendes humanistes : hommes blancs devenant esclaves d’autres hommes blancs et parfois d’Indiens, Indiens vendant des esclaves à des hommes blancs, Indiens s’alliant à des hommes blancs pour aller défoncer la gueule d’une tribu ennemie, etc. Malgré ses aspects pittoresques, j’ai du mal à m’intéresser à cette chronique et je ne suis pas sûr de la lire jusqu’au bout. Il faut dire qu’une lecture sérieuse est rendue difficile par la forme même de l’ouvrage, dont l’appareil critique abondant est fourré en fin de volume, ce qui oblige à lire avec deux marque-pages, et imprimé dans un corps microscopique. En outre il n’inspire qu’une confiance limitée, au vu par exemple d’une note comme celle de la page 90 où, l’auteur mentionnant certaines autruches, l’on nous explique savamment qu’ «il doit s’agir des casoars, les autruches d’Amérique» (l’éditrice, universitaire spécialisée dans la découverte du Brésil, n’a semble-t-il jamais entendu parler de nandous et ignore que les casoars ne sont pas des oiseaux américains)…

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