Le blog littéraire et agricole de Philippe Billé. Des notes de lecture, et des notes du reste.
dimanche 31 août 2025
peuple
Le souvenir me revient de ce bourge de gauche, un cinéaste italien je crois, déclarant jadis à la radio, de sa voix roulant les R et ruisselant d’autosatisfaction : J’adore le peuple. Ce J’adore le peuple, je ne l’ai jamais oublié. J’étais encore jeune, c’est une des toutes premières fois où j’ai ressenti qu’un certain type humain m’était radicalement insupportable.
jeudi 28 août 2025
cornouillers
Dans une de mes parcelles il y a une paire de cornouillers qui poussent tout près, peut-être trop près l’un de l’autre. Ils sont bizarrement penchés mais n’ont pas l’air d’aller mal, ils semblent même solides. J’aime bien ces deux arbustes parce que je leur trouve bonne mine, malgré leur silhouette atypique. ou peut-être à cause d’elle. Aussi je crois parce que c’est par eux que j’ai découvert l’espèce du Cornouiller dit mâle, je ne connaissais jusqu’alors que l’autre, plus menue, le Cornouiller sanguin. Je situe à peu près ces deux pieds. Il m’arrive de les chercher sans les retrouver, et de les trouver sans les avoir cherchés. Ces bois ne sont pas bien grands mais j’ai encore le plaisir de m’y perdre un peu.
mercredi 27 août 2025
mardi 26 août 2025
Knivet
Un des auteurs les plus tardifs du seizième siècle à avoir écrit sur le Brésil est le voyageur anglais Anthony Knivet, qui n’a d’ailleurs publié le récit de ses aventures qu’au début du siècle suivant. Je n’avais encore jamais lu son livre, dont le texte original n’est pas facile à trouver, et j’ai emprunté récemment la version française publiée en 2003 chez Chandeigne sous le titre Un aventurier anglais au Brésil : Les tribulations d’Anthony Knivet (1591). Ce gentilhomme participait à une expédition du corsaire Thomas Cavendish, dont l’activité principale consistait à razzier les installations portugaises sur la côte brésilienne. Ayant été abandonné par ses compatriotes, notre homme vécut alternativement parmi les Indiens et parmi les Portugais, souvent maltraité, toujours en danger. Son livre m’a fait penser à celui d’Ulrich Schmidel, de par la violence quasi incessante et omniprésente. L’histoire se déroule pendant la période «conradienne», la période incertaine des premiers temps de la présence européenne, pendant laquelle le sort des arrivants n’était jamais assuré, et se produisaient toutes sortes de massacres : non seulement d’Indiens par les Blancs mais aussi de Blancs par les Indiens, et comme toujours d’Indiens entre eux et de Blancs entre eux. Le récit abonde en épisodes non conformes aux légendes humanistes : hommes blancs devenant esclaves d’autres hommes blancs et parfois d’Indiens, Indiens vendant des esclaves à des hommes blancs, Indiens s’alliant à des hommes blancs pour aller défoncer la gueule d’une tribu ennemie, etc. Malgré ses aspects pittoresques, j’ai du mal à m’intéresser à cette chronique et je ne suis pas sûr de la lire jusqu’au bout. Il faut dire qu’une lecture sérieuse est rendue difficile par la forme même de l’ouvrage, dont l’appareil critique abondant est fourré en fin de volume, ce qui oblige à lire avec deux marque-pages, et imprimé dans un corps microscopique. En outre il n’inspire qu’une confiance limitée, au vu par exemple d’une note comme celle de la page 90 où, l’auteur mentionnant certaines autruches, l’on nous explique savamment qu’ «il doit s’agir des casoars, les autruches d’Amérique» (l’éditrice, universitaire spécialisée dans la découverte du Brésil, n’a semble-t-il jamais entendu parler de nandous et ignore que les casoars ne sont pas des oiseaux américains)…
lundi 25 août 2025
Ukrainiens
Cet alexandrin, repéré dans un titre d’article de La Nouvelle République du Centre-Ouest, résumant hier les propos de réfugiés ukrainiens, qui célébraient à Niort l’anniversaire de l’indépendance de leur pays : Il y avait l’espoir d’un avenir meilleur…
dimanche 24 août 2025
chemises
samedi 23 août 2025
asinerie
Hier après-midi je suis allé passer un moment à l’Asinerie du Baudet du Poitou, située à une douzaine de kilomètres de chez moi, dans la campagne entre Dampierre et la Villedieu. J’y vais rarement parce que c’est payant et je suis près de mes sous, aussi parce que je n’ai pas grand chose à y voir : on a vite fait le tour du domaine, de la petite salle muséale, et je n’aime pas beaucoup l’aspect desdits baudets, au pelage dépenaillé. Je leur préfère de loin les jolis petits ânes gris de Provence à poil ras, avec leur croix noire au garrot. Mais enfin il y a chaque année quelques dates où l’asinerie fait portes ouvertes, ainsi ce week-end pour les trois jours du Concours national mulassier. Alors vous êtes venu assister aux épreuves, m’a demandé un gentil animateur, qui cherchait le contact humain. Pas du tout, lui expliquai-je, je n’y connais rien, ni n’ai besoin d’y rien connaitre, ni ne suis moi-même cavalier, je veux juste contempler de beaux animaux. Et j’ai passé une petite heure à longer les allées, où les éleveurs cantonnaient toutes sortes de belles bêtes, de toutes les couleurs, dont d’imposants chevaux de trait. C’était un bon moment.
vendredi 22 août 2025
robots
Ce qui m'impressionne, chez les robots humanoïdes, plus encore que leur habileté, c'est leur incroyable laideur.
mercredi 20 août 2025
cartes
Je tiens du regretté Michel Ohl, outre un sac de lettres et quelques livres, deux documents jumeaux et de même dimension : ce sont les deux cartes psychogéographiques, si l’on peut dire, celle du département des Landes et celle des environs d’Onesse, qu’il a tracées au stylo sur des feuilles de format A3 (29,7 x 42 cm) disposées horizontalement. Dans cette note j’indiquerai quelques précisions et je formulerai quelques interrogations à leur propos.
La carte de Ohl-Landes, il me semble que c’est moi qui lui en avais suggéré l’idée. Elle a été réalisée fin mai ou début juin 1989. Michel en parle dans une lettre du 29 mai : «Je vais m’attaquer à la carte du pays ohl-landais : Guy-Marie (Renié) m’a filé des feuilles grand format, 2 x + grandes que la revue.» Elle a paru dans ma revue Documents-Pages n° IV, datée de juin, page 40. Je l’ai publiée telle quelle, sans autre modification que la réduction du format A3 au A4, et l’insertion de la mention marginale «Michel Ohl : ‘’Ohl-Landes’’, Bordeaux, 1989, DP-40». Dans une lettre de juillet? 1991, Michel lui-même m’a signalé un «ouvrage intitulé Landes, où est reproduite en tout petit p. 279 la carte de Ohl-Landes que tu as publiée le premier … Documents-Pages n’est point mentionné» (il s’agit de Landes, par Bénédicte Boyrie-Fénié et alii, dont Guy Latry, paru à Paris aux Editions Bonneton). La carte a été reproduite une deuxième fois en novembre 1992 aux pages 124-125 de l’ouvrage Michel Ohl : morceaux choisis, édité par Pierre Ziegelmeyer dans la collection Les Contemporains favoris, dirigée par Didier Moulinier à Arras. Cette carte a aussi été republiée en ligne le 19 avril 2009 dans un article intitulé Landes secrètes, du blog anonyme L’arbre aux questions, où l’on a eu la bonne idée de lister tous les toponymes figurant sur le document. Ces trois reproductions ont été faites d’après Documents-Pages, comme en témoigne l’inscription marginale, mais sans mentionner explicitement cette source. J’ignore s’il y en a eu d’autres.
La carte d’Onesse. Son cas est plus mystérieux. Je ne me souviens pas si j’ai prié Michel de la tracer ou si c’était son initiative. «Il me faut dessiner cette carte d’Onesse, qui tiendrait un peu de la carte du Schéol et de celle du Dur», écrit-il le 4 février 1990. Il me l’a confiée comme s’il était prévu que je la publie mais je ne crois pas l’avoir fait. J’ignore où et quand cette carte a été reproduite, si elle l’a été, en dehors des occasions suivantes. Le 11 août 1993, Michel me signale que «Edmond (Thomas) va publier Onessa, un opuscule vert jade du format de Boobook, avec carte toute petite incorporée». En effet cet opuscule de format 6 x 9 cm, imprimé par Plein Chant le mois suivant, comporte pages 8-9 une reproduction partielle (grosso modo le centre) de ladite carte. Bien plus tard, la carte d’Onesse est reproduite, cette fois-ci en entier mais en petit, au format carte postale (A6) sur le carton d’invitation de l’exposition posthume Michel Ohl homme trois lettres, qui se tient au Forum de Talence du 30 mai au 10 juin 2017. La carte d’Onesse est encore reproduite dans un article de Benjamin Ferret, «Landes : qui était Michel Ohl, cet écrivain d’Onesse-Laharie?» paru dans Sud Ouest le 18 octobre 2024, à propos d’une exposition s’ouvrant le lendemain à la médiathèque de cette commune.
Si l’on connait d’autres publications de ces deux cartes, il m’intéresse d’en être informé.
mardi 19 août 2025
août
Août est le seul des douze mois de l’année, dont le nom français écrit en toutes lettres ne comporte pas plus de signes, mais autant (quatre) que sa notation en chiffres romains, VIII.
dimanche 17 août 2025
haine
Le journaliste Antoine Leiris s’est rendu célèbre par sa lettre «Vous n’aurez pas ma haine» adressée aux terroristes musulmans qui venaient d'assassiner son épouse lors du massacre du Bataclan en novembre 2015. Le texte a d’abord paru sous la forme d’un message publié sur Facebook puis repris par le journal Le Monde. Il s’est ensuite avéré être un filon inépuisable, donnant lieu à un livre, un documentaire, une adaptation au théâtre et une au cinéma. Pour ma part je me suis contenté de prendre connaissance du texte initial, qui tient sur une page. Je n’arrive pas à m’accorder avec le point de vue énoncé. Je veux bien que l’auteur se soit exprimé sous le coup de l’émotion, comme en témoignent plusieurs fautes de syntaxe, mais enfin je crois que c’est une erreur, de refuser de haïr ce qui est haïssable. A moins que le but ne soit de prendre la pose. Et non seulement ce gentilhomme se targue d’ignorer la haine, mais il conclut en assurant que son fils, âgé de dix-sept mois au moment des faits, pensera de même. Or c’est bien incertain : qui sait si le rejeton n’aura pas plus de jugement que son père ?
samedi 16 août 2025
ménoures
J’ai rêvé que la désignation commune pour les espèces animales de plus petite taille était les Ménoures. Réflexion faite, ce mot semble être une variante possible de l'adjectif Mineures, panachée avec le nom des Batraciens sans queue, les Anoures.
vendredi 15 août 2025
double
L’autre matin à la poste de Villeneuve, pour expédier en Espagne une simple lettre de moins de 100 grammes, j’ai dû payer 4,50 euros. L’après-midi, au Bricomarché de Saint-Jean, j’ai acheté onze seaux de gravier, soit environ 110 litres, soit environ 160 kilos, et j’en ai eu de même pour 4,50 euros.
jeudi 14 août 2025
musique
Lorsque j’étais ado, un copain mieux né que moi avait entrepris de me civiliser en me faisant découvrir quelques oeuvres de musique classique. Il y avait d’abord eu le cinquième des Concertos brandebourgeois, de Bach, puis le Requiem de Mozart, puis celui de Fauré. Je ne me souviens plus de ce qui avait suivi. Cet enseignement par prêt de disques n’avait d’ailleurs peut-être pas duré longtemps, mais je n’ai jamais oublié le trio initiatique. Cela m’avait ouvert à un domaine, dont je ne suis jamais devenu bien familier, mais je suis toujours resté reconnaissant de l’attention, à cet ami perdu de vue. Je ne sais pourquoi je repense à ça ce matin, en écoutant le silence de mon jardin.
lundi 11 août 2025
Taussat
samedi 9 août 2025
bétail
Il y a quelque chose de désespérant dans le triste sort du bétail, qui de génération en génération finit toujours en boucherie, docilement depuis des millénaires, sans comprendre ce qui lui arrive et naturellement sans se révolter contre ce destin à perpétuité, puisque naturellement les animaux sont trop bêtes pour cela. Il ne m’étonnerait pas que l’évolution de la sensibilité humaine nous conduise un jour à rejeter cet asservissement, de même que l’esclavage, jadis pratiqué partout, nous parait aujourd’hui inacceptable.
vendredi 8 août 2025
biodiversité
Elles sont maintenant innombrables, ces courtes vidéos animalières, sur lesquelles on tombe même sans les chercher. Elles montrent tantôt de merveilleux tableaux : amitié insolite entre un animal et un être humain, ou entre espèces animales, animaux secourus par d’autres ou par des humains, cabrioles de quadrupèdes nouveaux-nés, dingueries de chats, etc. Je dois avouer que je suis assez bon public pour ces sucreries, j’en regarde volontiers de temps en temps. Et puis il y a aussi les vidéos terribles, révélant les horreurs de la biodiversité, le massacre incessant des proies, la dévoration sans pitié…
jeudi 7 août 2025
cryptos
Alexandrin commercial, et un brin ésotérique, vu dans une pub : À chacun sa façon de trader les cryptos.
mercredi 6 août 2025
falaise
Je ne peux voir une belle falaise sans songer qu’elle a dû servir, dans les époques, à en précipiter des condamnés, des sacrifiés ou des réprouvés.
mardi 5 août 2025
rencontres
A mon compte-rendu commercial d’hier, j’ajouterai cette note pour évoquer quelques rencontres. Il y eut par exemple ce couple âgé, elle cassée en deux, me racontant que lorsqu’ils arrivèrent là où ils vivent, il n’y avait qu’un arbre aux alentours de la maison, mais son mari en a si bien planté qu’il y en a maintenant peut-être mille. Il y eut ce gentilhomme avec qui j’ai négocié et finalement conclu ma meilleure vente. C’était manifestement un connaisseur et un esthète, au surplus un type vraiment charmant, genre Georges Clooney mais avec le regard intelligent. J’aurais dû essayer de le capturer au lieu de le laisser repartir. Il y eut surtout Roland, avec qui j’ai causé plus d’une heure. Je le revois depuis des années dans les vide-greniers, où il m’achète tous les livres sur les arbres, quand j’en ai, il doit en posséder une belle collection. C’est un bon connaisseur de la question et le seul avec qui j’ai de rares occasions d’en parler. La fois où on a fait connaissance, il m’a raconté qu’il avait fait pousser de graine des féviers d’Amérique, soit des Gleditsia triacanthos, ces sortes d’acacias aux épines longues comme le doigt, et qu’il en avait planté toute une haie. Ce curieux rural, plus ou moins de mon âge, vous parle en français normal, et l’on comprend au cours de la conversation qu’il connait non seulement le nom usuel mais aussi le nom latin des arbres et leur classement par familles, mais si l’un de ses voisins vient à le saluer en passant, il lui parle à leur façon : I charriais dau bois, c’est à dire Je transportais du bois, répond-il à quelqu’un disant l’avoir aperçu la veille. Ce dimanche je lui ai raconté entre autres ma mésaventure de l’année dernière, quand j’ai tenté en vain de signaler un houx de taille exceptionnelle à l’association s’occupant d’arbres remarquables (voir au 27 XII 24). A un moment un couple s’est arrêté et lui a demandé comment il allait. Mieux, répondit-il, et comme le propos intriguait, il expliqua qu’on lui avait diagnostiqué l’an dernier un cancer des os. Il entre dans les détails, ses douleurs au dos, les pompiers refusant de le transporter, lui-même payant un taxi pour l’emmener à Niort, son hospitalisation, l’identification et le traitement chimique de la maladie, les piqures dans le ventre, désagréables mais supportables, puis une si douloureuse qu’il s’est évanoui, après quoi, soupçonnant qu’il avait servi de cobaye pour un test, il avait décidé d’arrêter les soins et demandé à rentrer chez lui, où il vit seul. On suppose qu’il a reçu de l’aide à domicile, mais non, dit-il, il a tout refusé. Et voilà qu’il se met à pleurer au souvenir du très pénible hiver qu’il a passé, réapprenant seul peu à peu à marcher, peinant à soulever une simple casserole. Consternation de nous trois. Quelle histoire, en effet. Moi-même, la racontant à mon coach au téléphone le lendemain, j’en avais encore la gorge serrée. Mais enfin pour l’instant l’homme ne souffre plus et semble aller assez bien, s’il se promène sur les marchés. Une fois le couple reparti, je ramenai la conversation sur les arbres, pour détendre l’atmosphère. Roland m’a appris que l’érable dit de Montpellier aurait été ainsi nommé jadis abusivement par des botanistes de l’université de Montpellier, alors qu’il n’est pas particulièrement localisé autour de cette ville. Selon lui c’est dans notre région que cet arbre est le plus abondant. Cela ne me semble pas bien correspondre avec ce que je crois savoir des forêts locales, restes de l’antique sylve d’Argenson, séparant le Poitou de la Saintonge et marquant un seuil écologique, puisqu’elle serait à la limite méridionale de l’aire d’extension du hêtre et à la limite septentrionale de celle dudit érable de Montpellier. Cette situation marginale me parait mal s'accorder avec un peuplement plus dense, mais enfin c’est une question dont on pourra rediscuter. Une autre fois. Mon étalage se situait en bout de rangée, près du bord du stade, au-delà duquel se trouvait, à peu de distance, un petit bois de forme carrée, d’une trentaine de mètres de côté. Il était peuplé de tilleuls, d’érables et de frênes, vaguement plantés en rangs irréguliers, entre lesquels l’herbe était proprement coupée ras. Il régnait sous ce couvert une pénombre magique et bienfaisante. Dans les moments creux je désertais mon étal, pour aller m’y rafraichir. Aucun bois naturel n'aurait eu cet aspect. C'était pour moi encore une fois l'occasion de constater que ce vers quoi souvent me porte mon goût, ce que j'ai le plus de plaisir à contempler, n'est pas la nature elle-même mais la nature retouchée par l'homme.
lundi 4 août 2025
brocante
Le dernier samedi de juillet j’ai participé au vide-grenier de Prissé-la-Charrière. Bon plan : six euros la voiture, parc ombragé, espace non limité, donc outre mes cinq mètres de tables, j’avais aussi disposé des affaires sur l’herbe. Mon étalage était pour moitié de caisses de livres, dont je n’ai vendu presque aucun, et pour moitié d’objets divers (vaisselle, instruments, bibelots) dont j’ai tiré la maigre soixantaine d’euros gagnée ce jour-là. J’avais aussi innové en apportant deux plantes en pot, une pousse de thym et une de laurier, que j’ai vendues toutes deux, un doublon chaque. Hier dimanche j’ai pris part au vide-grenier de Villefollet, également dans les Deux-Sèves. Conditions différentes : emplacement gratuit jusqu’à cinq mètres, ce qui me suffit (j’ai deux tables de tapissier de deux mètres et une table de camping d’un mètre) mais dans un stade, c’est à dire un lieu sans ombre et je n’ai pas de parasol. Les prévisions de la météo m’avaient fait espérer un ciel voilé mais il faisait hélas grand beau temps, toutefois sans chaleur excessive. Tirant les leçons de la fois précédente, je n’avais apporté que des objets, plus une poignée de cinq livres (des petits guides d’histoire naturelle des années 70, finement illustrés) et quatre pousses d’arbres en pot (aubépine, troène, cyprès de Provence, érable negundo). J’ai gagné ce coup-ci plus de quatre-vingts euros, mais dont soixante en vendant seulement trois objets chics providentiellement offerts par une voisine. Sans eux la pêche eût été maigre. Et j’ai vendu quatre des cinq livres, ceux sur les fleurs, les arbres et les champignons, seul est resté celui sur les poissons d’aquarium. Quant aux petits arbres, plusieurs passants se sont arrêtés pour les examiner ou m’interroger à leur propos, mais personne n’en a acheté. Peut-être parce qu’il s’agissait cette fois-ci de plantes inutiles…
samedi 2 août 2025
baleines
Lettre documentaire n° 530
DES BALEINES, par Gabriel Soares de Sousa
DES BALEINES, par Gabriel Soares de Sousa
(Chapitre II-125 de sa Notícia ou Tratado descritivo do Brasil, 1587)
Je crois qu’il convient dans ce premier chapitre (1) de parler des baleines qui viennent dans la Baie (2). Ce sont les plus grands poissons de cette mer et les Indiens les nomment pirapuã (3). Il en entre beaucoup dans la Baie au mois de mai, qui est le premier de l’hiver dans cette région, et elles y séjournent jusqu’à la fin décembre, quand elles s’en vont. Pendant la saison d’hiver, qui dure jusqu’au mois d’août, les femelles mettent bas dans cette baie, à l’abri des tempêtes de la haute mer. Elles gardent là leurs petits trois ou quatre mois, jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de suivre leur mère au large. A cette époque les femelles recommencent à frayer, ce à quoi elles oeuvrent en grand tumulte. Quand les baleines sont dans la Baie, le poisson fuit vers les hauts-fonds ou les cavités, où elles ne peuvent les suivre, et parfois en les poursuivant elles viennent à s’échouer, comme il est arrivé dans le fleuve de Pirajá (4) en l’an 1580, où deux se sont échouées, un mâle et une femelle, que tout le monde a pu voir. J’ai fait mesurer la femelle, qui était entière. Elle était longue de soixante-treize empans (5) de la queue à la tête, et haute de dix-sept (6), sans compter la partie enfoncée dans la vase où elle reposait. Le mâle était sans comparaison plus grand mais on n’a pu le mesurer, car il avait déjà été équarri et sa chair emportée pour en tirer l’huile. La femelle avait la gueule si grande que j’ai vu un nègre installé entre les deux mâchoires, tranchant dans la lèvre du bas avec une hache qu’il tenait à deux mains, sans toucher celle du haut. Le bord de la lèvre était aussi gros qu’un tonneau de six almudes (7), et la lèvre du bas était en saillie par rapport à celle du haut, au point que ... (8). Cette baleine était grosse et on en a extrait un baleineau grand comme une barque de trente empans (9) de quille. On a tiré de ces deux baleines tant d’huile, que la contrée en a été gavée pendant deux ans. Quand les baleines sont dans la Baie, elles vont par troupes de dix ou douze et sont très redoutées de ceux qui naviguent, car elles se déplacent en rugissant et en bondissant, lançant de l’eau très haut en l’air. Et il est déjà arrivé qu’elles mettent des bateaux en pièces d’un coup de queue, entrainant la mort de leurs occupants.
Notes.
Je crois qu’il convient dans ce premier chapitre (1) de parler des baleines qui viennent dans la Baie (2). Ce sont les plus grands poissons de cette mer et les Indiens les nomment pirapuã (3). Il en entre beaucoup dans la Baie au mois de mai, qui est le premier de l’hiver dans cette région, et elles y séjournent jusqu’à la fin décembre, quand elles s’en vont. Pendant la saison d’hiver, qui dure jusqu’au mois d’août, les femelles mettent bas dans cette baie, à l’abri des tempêtes de la haute mer. Elles gardent là leurs petits trois ou quatre mois, jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de suivre leur mère au large. A cette époque les femelles recommencent à frayer, ce à quoi elles oeuvrent en grand tumulte. Quand les baleines sont dans la Baie, le poisson fuit vers les hauts-fonds ou les cavités, où elles ne peuvent les suivre, et parfois en les poursuivant elles viennent à s’échouer, comme il est arrivé dans le fleuve de Pirajá (4) en l’an 1580, où deux se sont échouées, un mâle et une femelle, que tout le monde a pu voir. J’ai fait mesurer la femelle, qui était entière. Elle était longue de soixante-treize empans (5) de la queue à la tête, et haute de dix-sept (6), sans compter la partie enfoncée dans la vase où elle reposait. Le mâle était sans comparaison plus grand mais on n’a pu le mesurer, car il avait déjà été équarri et sa chair emportée pour en tirer l’huile. La femelle avait la gueule si grande que j’ai vu un nègre installé entre les deux mâchoires, tranchant dans la lèvre du bas avec une hache qu’il tenait à deux mains, sans toucher celle du haut. Le bord de la lèvre était aussi gros qu’un tonneau de six almudes (7), et la lèvre du bas était en saillie par rapport à celle du haut, au point que ... (8). Cette baleine était grosse et on en a extrait un baleineau grand comme une barque de trente empans (9) de quille. On a tiré de ces deux baleines tant d’huile, que la contrée en a été gavée pendant deux ans. Quand les baleines sont dans la Baie, elles vont par troupes de dix ou douze et sont très redoutées de ceux qui naviguent, car elles se déplacent en rugissant et en bondissant, lançant de l’eau très haut en l’air. Et il est déjà arrivé qu’elles mettent des bateaux en pièces d’un coup de queue, entrainant la mort de leurs occupants.
Notes.
1. Le premier des chapitres qu’il consacre aux «poissons».
2. La Baie de Tous les Saints, Bahia.
3. Pirapuã : du tupi pira = poisson et puã = dressé.
4. Pirajá (= plein de poissons) est aujourd’hui encore le nom d’un quartier de Salvador, non loin de la crique d’Itapagipe.
5. 73 empans de 22 cm, soit environ 16 mètres. L’espèce la plus commune sur les côtes brésiliennes, la baleine à bosse (Megaptera novaeangliae ou M nodosa) peut mesurer jusqu’à 18 mètres, mais contrairement à ce qui est suggéré plus bas, les mâles sont en moyenne plus petits que les femelles.
6. Soit environ 3,75 mètres.
7. L’almude peut valoir entre 16 et 32 litres, soit un tonneau d’entre 100 et 200 litres.
8. Passage obscur (tanto que se podia arrumar de cada banda dele um quarto de meação). Le champagne à qui m’explique ce quarto de meação.
9. Soit environ six mètres et demi.
vendredi 1 août 2025
Stevenson
Une nouvelle écrite par Robert Louîs Stevenson dans ses dernières années, restée longtemps inédite, enfin publiée aux USA en 1989 d’après un manuscrit retrouvé, telle est The enchantress, dont je viens de lire la traduction française La magicienne (Rivages, 1991). Cela raconte l’aventure d’un jeune aristo chic mais fauché, un peu dindon aussi (ruiné au jeu) qui épouse une belle orpheline riche mais sous tutelle, rencontrée providentiellement. C’est elle qui le demande en mariage et l’on comprend enfin que cette maitresse femme veut seulement se libérer de sa tutelle par cette union et n’a pas l’intention de vivre avec le bonhomme. Cette histoire à dormir debout ne m’a pas passionné. J’ai trouvé le titre français trompeur, je pense que j’en aurais choisi un autre.
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