Le blog littéraire et agricole de Philippe Billé. Des notes de lecture, et des notes du reste.
mardi 28 octobre 2025
Goulebenéze
L’occasion se présentant, j’ai feuilleté le livre que les éditions Le Croît vif ont consacré en 2007 à Goulebenéze, le Charentais par excellence. Cet énorme pavé de 740 grandes pages comprend de savantes études (par Charly Grenon, Pierre Péronneau, Eric Nowak) sur les ancêtres, la vie et l’oeuvre de celui qui se nommait en fait Evariste Poitevin (1877-1952). L’ouvrage comprend aussi et surtout l’ensemble des historiettes et des chansons composées par le barde saintongeais, tantôt en français, tantôt en patois. (Il est vraiment dommage que l’on n’ait pas eu l’idée de doter d’un ou deux index, ou d’une table complète des titres, ce généreux volume dans lequel on est condamné à fouiller à l’aveuglette pour y retrouver un texte…). Goulebenèze (écrit tantôt avec un accent grave et tantôt un aigu), c’est à dire Gueule bien à l’aise, avait bien choisi son pseudonyme, qui peut s’appliquer aussi bien à sa gouaille de beau parleur et chanteur, qu’à son épicurisme de buveur et mangeur. Malgré ce que pourrait faire croire le personnage de modeste paysan moustachu en sabots, blouse bleue et petit chapeau, qu’il a campé toute sa vie, et pour lequel il avait sans doute une sympathie sincère, Goulebenéze était issu de ruraux bien enrichis, devenus grands propriétaires terriens et même châtelains, mais dont la prospérité fut affaiblie par la crise du phylloxéra. Je dois avouer que je ne me sens pas très attiré par la personnalité de cet amuseur provincial franchouillard, humaniste anticlérical de gauche, qui a consacré un hymne pompeux aux «citoyens du monde» (p 690) et du reste j’ai du mal à lire le patois, que je ne connais pas très bien. Je ne déteste pas son poème le plus connu et assez long Bonjour, Saintonge (C’est le pays joyeux où la grive d’automne / Se grise de fruits d’or parmi les pampres roux / Où le gai vendangeur sous la hotte chantonne / A l’appel des coupeurs qui boivent le vin doux) dans lequel il passe en revue toute la province, citant plusieurs villes et faisant la part belle au bord de mer. On peut sourire à ses chansons sur les boissons locales, comme Le vin bian (le vin blanc : que reun rempiace … O vous r’met l’ thieur en piace, 266), la Valse dau Cougnat (valse du cognac : O l’est une lithieur sans pareille / Queuneussez-vous reun de pu bon ? … O l’est moëleux, o l’est piaisant / O vous met dau baume dans la goule ! 267) ou encore la Chanson dau Pinaud (chanson du pineau : O l’est l’ Pinaud qu’est le roi d’la vinoche / Thiau vieux Pinaud aussi jhaune qu’un lu d’or, 270). Pour faire bonne mesure je citerai aussi la chanson où il raille Les bains de soulail, que l’on prend pour avoir la pia tannée (la peau bronzée) : A Fouras coum à Chatelaillon / A Rouéyan coum à La Rochelle / N’on vouet des drolesses sans cotillon … A sont là toute la sainte jhornée / Couchées su’ l’ vente, en piein soulail…
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