Je ne sais si j’aurai un jour lu en entier Le cabinet Lambda mais je suis reconnaissant à l’auteur, Paul Lambda, de m’avoir procuré cet imposant volume de plus de sept cents pages, paru il y a deux ans. Son long sous-titre annonce qu’il s’agit d’un recueil de «5014 citations à siroter, croquer, injecter ou infuser, tirées de livres, de films, et de deux trois passants, de beaucoup de morts et de quelques vivants» mais pas du compilateur lui-même («C’est mon meilleur livre car il n’est pas de moi») bien qu’il ait par ailleurs écrit des aphorismes. A vrai dire ce genre d’ouvrage ne demande pas à être lu in extenso, on peut l’ouvrir à n’importe quelle page et le butiner par petites prises. Aussi ai-je décidé de lui accorder un permis de séjour prolongé sur ma table de nuit et de le consulter épisodiquement, en alternance avec mes autres lectures. Il se présente sous la forme d’un dictionnaire, où les courtes citations sont données sous des entrées thématiques, disposées dans l’ordre alphabétique. Elles ne sont longues que de quelques phrases, souvent une seule. On y trouve tous les thèmes imaginables, et d’autres plus inattendus. La plus étonnante et minime, sur laquelle je sois tombé jusqu’à présent, est l’entrée Hmm, dont la citation se résume à «Hmm…» (Murakami). J’explore cette intéressante somme tantôt en la feuilletant au hasard, tantôt en passant par l’index des auteurs cités. Cet index permet d’apprécier l’étendue et la variété des lectures de Lambda, et de comparer ses goûts aux nôtres. Je remarque que certains de mes écrivains préférés en sont absents (Caraco, Ciry, Balfort…), que d’autres n’y apparaissent qu’une fois (Davila, de la Serna, Debord…), mais d’autres de mes chouchous sont bien représentés, comme Cioran. Certains auteurs, que je ne connaissais que de nom, sont si souvent cités qu’ils mériteraient quasiment le statut de co-auteurs, tels Eric Chevillard et Haruki Murakami. Je découvre à l’entrée Lecture cette citation de Charles Juliet : «Nombre de mes lectures ont été gâchées. Parce que j’étais trop avide. Ce que j’absorbais ne pouvait être assimilé.» C’est entendu : pas de précipitation, prenons notre temps…
Le blog littéraire et agricole de Philippe Billé. Des notes de lecture, et des notes du reste.
jeudi 30 juin 2022
vendredi 24 juin 2022
Coppens
Un souvenir personnel mais bien flou, du paléoanthropologue Yves Coppens, dont on a annoncé la mort cette semaine à 87 ans. Il fait partie des quelques personnalités connues par la télévision, à qui j’avais écrit quand j’étais ado. Je ne sais plus ce que je lui avais demandé, peut-être des conseils de lecture, et je n’ai pas conservé sa réponse, courtoise et attentive quoique tardive, il avait mis six mois. Un détail m’intrigue, c’est que je ne saurais dater cet échange. J’avais écrit ainsi à quelques savants et voyageurs vers 1970, mais Coppens n’est devenu célèbre qu’après sa découverte du squelette de l’australopithèque Lucy en 1974 et Wiki ne signale pas qu’il soit passé à la télé avant 1975. Ah, peu importe. Je lis dans les commentaires que sa théorie de l’origine africaine de l’homme («Out of Africa») a été depuis remise en question, y compris par lui-même. Quelqu’un a fait remarquer que cette théorie devait une part de son succès médiatique et populaire au fait qu’«on avait envie d’entendre ça». Il y a sans doute dans l’opinion un courant africomane. Celui qui, cette semaine encore, fait dire à un inspiré, sur France Musique, qu’«On oublie à quel point la musique classique a tiré ses sources d'inspiration de la musique africaine». Sans blague…
mercredi 22 juin 2022
gaucherie
Il est bien connu que les comédiens de nos jours contribuent volontiers à la science politique, et je viens de lire sur les réseaux cette citation attribuée au regretté Jean-Louis Trintignant : «Tous les grands progrès humains se sont faits avec la gauche, il ne faut quand même pas l'oublier.» Je n’en doute pas : la domestication du feu et du bétail, l’invention de la roue, de l’écriture, de la métallurgie, de l’imprimerie et de l’électricité, la découverte de l’Amérique et j’en passe, sont certainement l’œuvre exclusive du génie fertile de la gauche. Cette affirmation pleine de discernement me rappelle une autre citation, lue il y a quelques mois dans les mêmes parages et émanant d’un collègue de Trintignant, le non moins regretté Jean-Pierre Bacri : «Vous savez, je suis de gauche toute la journée, pas besoin d’être un héros pour ça : il me suffit de considérer l’intérêt général avant le particulier, de préférer le respect de l’individu aux lois du marché. Plus concrètement, d’essayer à chaque coin de rue d’être attentif à l’autre, à l’étranger, d’être tolérant.» Reconnaissons-le en toute modestie : la bonté, le désintéressement, la générosité, l’altruisme, la tolérance, la sollicitude, sont des vertus exclusives de la gauche, dont la droite ingrate est hélas dépourvue, la nature est ainsi faite. Quelle suffisance... On a parfois l’impression qu’à l’instar de monsieur Jourdain, qui faisait de la prose sans le savoir, l’homme de gauche est totalitaire sans en avoir la moindre conscience, il totalitarise comme il respire. Il se voit si parfait qu’il ne peut seulement concevoir que l’on puisse ne pas penser tout à fait comme lui. Lui seul est bon, l’expression «de droite» est pour lui synonyme de «méchant». Il est très ouvert à l’Autre, sauf quand l’Autre n’a pas les mêmes idées. Il adore la Différence, sauf sur le plan philosophique.
vendredi 17 juin 2022
Monod
Ces derniers temps j’ai parcouru, lu des passages des Méharées de Théodore Monod. J’avais trouvé dans une boite à livres une édition de poche récente (Actes Sud, collection Babel, 2018) de cet ouvrage paru en 1937 et maintes fois réédité depuis. Monod y évoque ses voyages à travers le Sahara et le Sahel dans les années 20 et 30. Peu d’hommes auront mérité autant que lui la qualification de savant, étant à la fois zoologue, botaniste, géologue, topographe, archéologue, préhistorien, théologien… excusez du peu. Mais ses notes ne sont pas toutes scientifiques, loin de là, son livre est d’abord une oeuvre littéraire où il raconte aussi sa vie matérielle, dresse des portraits, fait des réflexions, décrit des paysages. J’ai remarqué son goût pour les notations colorées. Ignorant la plupart des noms de lieux cités, j’ai assez vite renoncé à suivre en détail ses itinéraires mais là n’est pas l’essentiel. On sent chez Monod un tempérament de sportif à la Sylvain Tesson, qui se plait à affronter les rigueurs d’un climat extrême. J’ai déploré qu’une paire de fois il se livre à des blagues idiotes, telle au chapitre IX la crotte de bique glissée dans le verre de thé d’un de ses compagnons. Autrement il donne plutôt l’impression d’un homme pondéré. J’ai noté cette phrase du chapitre VII où il se définit comme «étant par principe opposé à toute destruction inutile, donc à la chasse». Ce livre est un vaste capharnaüm, tout lecteur doit pouvoir y glaner quelque chose à son goût.
mercredi 15 juin 2022
nouveau
NOUVEAU MONDE
(poème-liste sur une
idée de P Joncquez)
Nouvelle-Angleterre
Nouveau-Brunswick
Nouvelle-Calédonie
New Delhi
Nouvelle-Ecosse
Nouvelle-France
Nouvelle-Guinée
Nouvelles-Hébrides
Nouvelle-Irlande
New Jersey
New Kent
New London
Nouveau-Mexique
New Norfolk
Nouvelle-Orléans
New Providence
Nouveau-Québec
New Richmond
New Suffolk
New Territories
New Ulm
New Vienna
New Westminster
New York
mardi 14 juin 2022
lundi 13 juin 2022
alimentation
Les sociétés caritatives me donnaient trop à manger, en tout cas plus que je ne consomme, aussi ai-je décidé de renoncer au service hebdomadaire des Restos du Cœur de Saint-Jean et vais-je me contenter du service bimensuel de la Banque alimentaire de Loulay, plus près de chez moi. Abondance de biens ne nuit pas, mais point trop n'en faut.
dimanche 12 juin 2022
Lucien
samedi 11 juin 2022
volaille
Ma volière prend vie. Il est difficile de trouver des oiseaux dans les environs, à cause d’une épidémie de grippe aviaire, mais j’ai pu m’en procurer en allant jusqu’à Saintes, à cinquante kilomètres de chez moi. J’ai ainsi pu acheter deux Cailles du Japon (Coturnix japonica) lundi de la semaine dernière. Ce sont depuis longtemps les cailles d’élevage les plus courantes car l’espèce indigène, la Caille des blés (Coturnix coturnix) est interdite de vente. Plutôt qu’un couple, qui aurait eu des petits dont je n’aurais su que faire, j’ai choisi deux femelles. Elles ont pondu trois jours, en tout quatre œufs, puis se sont mises en grève. Je suis peut-être tombé sur des cailles socialistes et j’ignore quand elles reprendront la production, mais j’apprécie quand même leur compagnie et elles ont l’air de bien se porter. Et avant-hier, une bienfaitrice m’a gentiment offert un petit mâle de Colombe diamant (Geopelia cuneata). C’est une espèce de tourterelle australienne de très petite taille (vingt centimètres, dont dix de queue) à l’œil cerclé de rouge et au dos gris-bleu tacheté de blanc. Elle paraît bien s’entendre avec les cailles, picore à côté d’elles sur le sol, et va se percher quand elle veut s’isoler. De temps en temps les cailles gloussent discrètement et Colombo chantonne une courte chanson de cinq notes, trois longues et deux brèves. Je m’occupe de ce petit monde et j’espère en tirer bientôt de meilleures photos que celles que j’ai obtenues jusqu’à présent.
mercredi 1 juin 2022
divers
Trois autres faits divers, qui ont retenu mon attention dans le mois écoulé. – Dans le Vermont un homme de vingt-huit ans, déjà soupçonné d’avoir flingué son grand-père de trois balles dans la tête en 2013, est maintenant accusé d’avoir noyé sa mère afin de palper un héritage de quelques millions de dollars. Ainsi donc, amis marxistes, il n’y a pas que la misère qui pousse au crime. -- En Caroline du Sud un homme de soixante ans est mort d’une crise cardiaque en enterrant dans le jardin sa compagne, qu’il avait étranglée la veille. Comme quoi il y a parfois une justice immanente. – Plus près de chez nous, en Charente et Charente-Maritime, deux hommes de 37 et 58 ans auraient détourné 410.000 euros en organisant, entre 2018 et 2020, une centaine de lotos soi-disant caritatifs pour des associations-écrans. L’un d’eux aurait claqué la bagatelle de 200.000 euros dans les casinos. Je m’attends à ce que la Justice les condamne durement, par exemple à un stage de citoyenneté.