vendredi 13 septembre 2024

Berlin 2

Voici un résumé des endroits où nous avons marché et mangé. Le mardi 3 après-midi, nous dirigeâmes nos pas vers l’ouest. Je dois ici expliquer que quelques jours avant le départ, je m’étais avisé que ce séjour pourrait être l’occasion de vendre enfin un de mes livres les plus précieux, qui n’avait jamais intéressé mes clients français. Trouvé dans une benne providentielle il y a une trentaine d’années, c’était un exemplaire du roman d’Alfred Döblin, Berlin Alexanderplatz, à la couverture un peu crasseuse mais à l’intérieur frais. Par chance il s’agissait de la première édition, de 1929, et par supplément de chance un autographe de l’auteur, daté de Paris, 1 Februar 1934, s’étalait sur toute la première page. Songeant à essayer de rentabiliser mon déplacement, j’avais contacté par mail des libraires d’ancien à Berlin. Quelques uns se déclarèrent intéressés, on discuta un peu. J’arrangeai des rendez-vous plus ou moins précis avec sept marchands : je rendrais visite l’après-midi de notre arrivée au plus proche de l’hôtel, dans le secteur de Tempelhof, et je consacrerais la journée du lendemain à rencontrer les six autres dans le quartier un peu plus distant de Charlottenburg. Ce mardi après-midi, donc, après avoir déjeuné tardivement d’un Chicken Gemüse Kebab sur la Bülowstrasse, nous nous rendîmes au premier Antiquariat que je devais visiter. L’aimable gentilhomme m’attendait avec une proposition imprévue et tentante. Au vu du bon état et de l’intérêt du livre, il acceptait de l’acheter pour les 800 euros que je lui en avais demandé par mail, me laissant libre d’en décider tout de suite ou d’attendre de voir ce qu’en diraient ses confrères le lendemain. J’hésitai quelques minutes puis, considérant que je n’avais guère espoir de gagner plus, que cette somme supérieure à ma pension mensuelle me payait largement le voyage, et qu’en réalisant la transaction sans attendre, je libérais ma journée du lendemain, j’acceptai. J’éprouvai un grand soulagement d’avoir conclu si vite et bien cette petite aventure commerciale. Avec ma camarade, nous repartîmes vers l’ouest. Dans la Tauentzienstrasse nous nous promenâmes un moment dans l’immense magasin KaDeWe, où l’on dit qu’il y a tout et je veux bien le croire. Nous visitâmes en particulier le dernier étage, celui des plats cuisinés, et celui du dessous, plein de beaux objets, comme des machines à café électriques en céramique bleue et blanche. De là nous avançâmes jusqu’au n° 199 de l’avenue Kurfürstendamm, qui fut l’adresse d’Albert Caraco. Je ne sais de quand date l’immeuble actuel, qui est peut-être une reconstruction d’après-guerre. De part et d’autre de la porte d’entrée, les plaques de médecins et d’agents immobiliers. En rentrant le soir, dîner de calmars dans une pizzeria, peut-être dans Geisbergstrasse. 

    Le mercredi 4, nous remontâmes la Potsdamerstrasse vers le nord en faisant un crochet le long d’un canal, et au-delà jusqu’à la Potsdamerplatz, peuplée d’immenses bâtiments modernes. Elle m’a paru moins horrible en vrai que sur les photos, mais pas très à mon goût non plus. Nous y avons vu notre premier petit bout du Mur de Berlin, resté debout à côté d’un restaurant. Poursuivant vers le nord par l’Ebertstrasse, nous vîmes le Mémorial aux Juifs assassinés d’Europe : des alignements de dalles de béton gris s’étalant sans explication sur la bagatelle de deux hectares. Ce genre de monument, exposant moins la souffrance passée des victimes que le pouvoir de leurs descendants à clamer leur victimitude, me laisse un peu perplexe, je dois avouer. La rue Ebert aboutit à la fameuse porte de Brandebourg, dont la silhouette est reproduite sur toutes les vitres du tramway. C’est une belle colonade à l’antique, un peu pompeuse, supportant une terrasse ornée de bas-reliefs et surmontée par la statue d’un quadrige. Le Brandebourg est le nom de la province dont Berlin est la capitale. Un peu plus au nord nous considérâmes à distance le palais du Reichstag, avant de nous reposer un moment dans l’extrémité Est du Tiergarten. Un de mes regrets est de ne pas avoir visité plus avant cet immense bois situé en pleine ville, en quelque sorte le Central Park de Berlin. Revenant à la porte de Brandebourg, nous flânâmes un moment le long de l’avenue Unter den Linden (sous les tilleuls) qui part de là vers l’Est. C’est l’une des deux rues les plus célèbres de la ville avec le Kurfürstendamm, et à mon avis la plus belle. Nous dérivâmes ensuite vers le sud. Nous traversâmes péniblement la Gendarmenmarkt, supposée être la plus belle place de Berlin, ce qui ne nous a pas sauté aux yeux, tout encombrée qu’elle était de chantiers et de palissades bouchant la vue et obligeant à des détours. Nous descendîmes la Friedrichstrasse jusqu’à l’inévitable guérite du Checkpoint Charlie. Chemin faisant nous nous arrêtâmes dans une sorte de village hippie installé sur une place, pour y déjeuner de Currywurst, soit des rondelles de saucisse baignant dans la sauce tomate au curry et accompagnées de patates. Très savoureux, probablement pas très diététique. Repartant vers le sud-ouest nous vîmes encore le long morceau de Mur conservé sous le nom grandiloquent de Topographie de la Terreur, avant de rentrer nous écrouler à l’hôtel. Le soir, dîné d’excellentes boulettes et autres turqueries au Sofram Restaurant de la Potsdamerstrasse. 

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