N’ayant pas le temps ni vraiment besoin de lire en entier les 700 pages du pavé publié en 2019 par Pierre-Frédéric Charpentier : Les intellectuels français et la guerre d’Espagne, Une guerre civile par procuration (1936-1939), je me suis contenté d’en lire quelques passages. L’auteur (qui a écrit par ailleurs une Histoire des grands perdants de l’élection présidentielle et un ouvrage consacré au groupe de rock The Clash) livre ici une étude très sérieuse, bien documentée, et assez équitable. Le tableau est sans grande surprise dans l’ensemble mais très intéressant dans les détails. L’historien, dont la sympathie va sans doute à l’humanisme républicain, a l’honnêteté de reconnaître certaines réalités établies mais le plus souvent passées sous silence, par exemple le fait que des persécutions anti-chrétiennes ont eu lieu dès les premiers mois de la République en 1931, et que quand la guerre civile éclate, «aucun des deux camps ne le cède à l’autre dans l’abjection» (p 430). S’agissant de l’attitude de la gauche française, Charpentier estime que «Avec le recul, on s’indigne devant l’assourdissant silence de ces intellectuels de gauche qui ne voulurent voir les atrocités que dans le camp d’en face» (428). Le problème, ajouterais-je, est que quatre-vingts ans après, la gauche intellectuelle n’a guère évolué. Je suis bien placé pour observer que dans les universités, on continue d’enseigner l’histoire manichéenne de la guerre des vilains franquistes indéfendables contre les gentils républicains irréprochables, et la question des crimes anar-communistes est un sujet tabou. Que ce livre en parle n'est pas son moindre mérite.
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