samedi 24 août 2024

sevrage

    Il y a sans doute pire mais ce n’était pas une mince épreuve pour moi que d’être privé d’ordi pendant trois jours. Je l’ai porté à réviser mardi, pensant le récupérer le jour même, mais le technicien avait besoin de le garder et ne me l’a rendu qu’hier. Je n’avais pas prévu ce douloureux sevrage. Cela m’a permis de mesurer une fois de plus combien notre vie, la mienne en tout cas, dépend maintenant du net. Non qu’on le tête en permanence mais du moins assez souvent, pour l’information, pour le divertissement, et pour Dieu sait quoi. Trois jours sans internet, donc, et sans l’ordi lui-même. Les pires moments furent les repas, que je ne prends plus sans regarder un journal ou des vidéos. Je fus réduit à des procédés ignobles : retourner chercher dans ma remise le vieux radio-cassette crachotant pourri, qui ne capte plus que trois stations, hélas toutes du service public... Quel supplice. Je reviens de loin. Tout ça pour apprendre finalement que mon ordi ne souffre d’aucune maladie particulière, et que s’il marche de plus en plus mal, c’est qu’il ne peut pas marcher mieux. Un peu comme moi, quoi. Ce MacBook Air vieux de dix ans est déjà une antiquité impossible à remettre à jour. Soit. J’ai profité de ces trois jours sans distraction pour avancer mes travaux au jardin et pour revisiter la pièce principale de ma documentation en papier : quelques centaines de feuilles de format A4 (articles, images, pages de revues, photocopies, notes de lecture, lettres du temps où l’on envoyait des lettres...) stockées par ordre alphabétique dans deux classeurs-trieurs en carton, le tout présentant une épaisseur d’environ quinze centimètres. Ce passage en revue m’a occupé quelques heures. Un de mes buts était de voir s’il y avait du désherbage à faire, car ces archives datent pour l’essentiel de l’époque où les documents étaient des objets en papier, or mes habitudes se sont modernisées depuis et je trouve aussi pratique, sinon plus, d’utiliser des articles ou des livres numériques. Mais la plupart de ces documents m’ont paru devoir être conservés tels quels, et je n’en ai supprimé qu’une pincée. Par exemple un article de revue astronomique américaine, du temps où j’avais été épaté de découvrir l’excellente dark-sky scale, l’échelle d’obscurité du ciel nocturne mise au point par John Bortle vers l’an 2000. Je n’ai plus besoin de l'article, il y a maintenant une notice de Wiki où cette échelle est bien exposée. De même une chronologie des journaux de Michel Ciry, que l’on trouve maintenant et plus complète dans Wiki. Mais il m’a beaucoup intéressé de revoir, de relire par endroits ces archives. Que de trésors concentrés là, qui risquent hélas de filer directo à la déchette le jour où je vais moi-même disparaître (il faut bien y songer, hein). Une grande surprise a été de redécouvrir, car je l’avais totalement oublié, qu’après avoir correspondu quelque temps avec l’ethnologue Jacques Lizot quand j’étais ado au début des années soixante-dix, j’avais de nouveau échangé quelques lettres avec lui vers la fin des années quatre-vingt. Il avait toujours la même boite postale à Caracas. Je lui avais alors demandé ce qu’il pensait de livres que j’avais étudiés entre temps, comme le roman Maíra, de Darcy Ribeiro («Je n’ai pas lu Darcy Ribeiro. Je dois dire que j’ai un très mauvais souvenir de lui. C’est un homme très antipathique.») ou l’étude de Betty J Meggers, Amazonia, a ilusão de um paraíso («J’ai lu en anglais le livre de Betty J Meggers. Je l’aime beaucoup, bien que certains points de vue auraient besoin d’être plus nuancés.»). Ah, Meggers, il faudra un jour que j'en parle ici...

4 commentaires:

  1. « Tous les trésors que nous accumulons dans nos placards, dans nos armoires, dans nos tiroirs, forment ce déchet dont Emmaüs ne voudra pas. »

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  2. Ah, ok. Ce n'est pas faux, nous chérissons parfois des biens dont autrui n'a que faire. Et Emmaüs n'est pas un modèle de discernement...

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