lundi 8 juillet 2024

fascimse

    Eh bien, la France a échappé au fascimse. Elle va pouvoir se vautrer dans l'anti-fascimse. Je m'en régale d'avance.

dimanche 7 juillet 2024

été

    D’ordinaire à cette époque on subit un net réchauffement climatique, ce que l’on appelait autrefois « l’été », lequel à vrai dire devrait être là depuis des semaines, or le phénomène reste très modéré cette année, ce matin par exemple il ne fait même pas dix degrés dans le jardin, ce qui est appréciable, on ne peut pas se plaindre de la chaleur.

samedi 6 juillet 2024

Prusse

    C’est somme toute un assez beau voyage, qu’a fait le prisonnier de guerre Jean Hervé de 1940 à 1945. Il était né en novembre 1913 à Courant en Charente-Maritime et apprit la boucherie. Il fut après guerre boucher à Villeneuve la Comtesse et fut en outre le maire de cette commune de 1968 à 1989. C’est lui qui créa en 1984 la bibliothèque municipale qui porte aujourd’hui son nom et où je viens d’emprunter ses Souvenirs de captivité. C’est un modeste mémoire d’une trentaine de pages A4, tiré sur une imprimante de bureau, avec une reliure à ressort. L’ouvrage présente des traits d’amateurisme : le texte n’a pas été relu soigneusement, la couverture montre la vieille photo de deux jeunes hommes, dont on n’a pas jugé utile de préciser lequel est l’auteur, et l’on a oublié d’indiquer la date de publication, mais comme il est dit en préambule que c’est à l’occasion de ses quatre-vingts ans, que l’on a prié l’édile d’écrire ses souvenirs, on peut situer la parution en 1994 ou circa. Jean Hervé écrit sans façons, il appelle les villages des patelins, il s’exprime en homme du peuple, simplement mais clairement. Il se laisse parfois aller à des banalités bien-pensantes : il ne manque pas de montrer qu’il sait bien qui étaient les gentils et les méchants de la deuxième Guerre mondiale, et traite Hitler de «voyou» (p 18), ce qui ne demande pas un grand courage, cinquante ans après la mort du tyran. Mis à part ces réserves, son mémoire m’a paru intéressant. Mobilisé en août 1939 (donc à 25 ans), il est fait prisonnier en juillet 1940 aux environs de Dijon et expédié en Alsace, à Colmar (ce détail, entre Dijon et Colmar : «Les wagons sont mal fermés, quelques camarades en profitent pour sauter du train en marche», 5). Là, il accepte une proposition des Allemands pour ceux qui le veulent, donc sans obligation, d’aller travailler en Prusse orientale, vieille province allemande depuis des siècles, située entre la Pologne et la Lituanie, avec pour capitale Koenigsberg, la ville de Kant. Il y est conduit avec un troupeau d’hommes et de chevaux, dans des wagons à bestiaux. Il officiera toujours à la campagne, tantôt comme garçon boucher, jardinier, ou simple manutentionnaire, dans des camps et surtout des fermes, le plus longtemps dans le village de Landsberg (7), près de la ville qui s’appelait encore Eylau (5). Son récit est émaillé de notations sur la sympathie ou l’antipathie qui s’établit selon les cas entre lui et les locaux, lesquels montrent en général «plus de curiosité que d’animosité» (9). Chez un fermier, dont il remplace le fils mobilisé, il sent que la fille lesbienne le méprise (8). En certaine occasion il remarque la «haine ancestrale» entre Allemands et Polonais (11). Il note aussi que deux Juifs parmi les prisonniers français «n’ont jamais été dénoncés, bien que la population allemande soit au courant» (14). Il ne se plaint pas de son sort : il n’est pas maltraité, il est payé, mal mais quand même, il reçoit du courrier de France, dont des colis alimentaires (11), ses employeurs lui font des cadeaux à Noël (9). Il a conscience d’être relativement «privilégié», notamment quand il lui arrive de rencontrer des compatriotes efflanqués et crasseux, moins bien lotis que lui (12). Au moment de l’arrivée des troupes soviétiques venues de l’Est en février 1945, il ne fait pas état du viol massif des femmes allemandes par les soldats russes, dont il n’a peut-être rien su, mais note l’ambiance chaotique : «Nous voilà donc avec des Russes, beaucoup d’entre nous avaient imaginé la libération autrement, il faut matriculer ses abattis, les rafales de mitraillette partent toutes seules et le danger est partout. Il nous faut traverser la ville, il y a de nombreuses victimes dans les rues, sur les trottoirs, les cadavres trainent partout, ces nouveaux arrivants qui n’ont rien à manger vident les maisons d’alimentation, boucheries, épiceries, aidés en cela par une foule de gamins sortis de je ne sais où. (...) Il y a dans l’Armée rouge (...) des gosses, 13-14 ans, les plus dangereux, ils font la guerre pour s’amuser, tous marchant à la vodka.» Hervé ne dit pas non plus un mot du nettoyage ethnique assez parfait qui va être effectué par les Russes dans l’année même, certes après son départ, mais il aurait pu en entendre parler pendant le demi-siècle qui a suivi (la population allemande, largement majoritaire depuis des siècles, ne représentait plus, au recensement de 2021, que 0,28 % des habitants de la capitale rebaptisée Kaliningrad, du nom d’un des dirigeants bolcheviques ayant autorisé le massacre de Katyn). Hervé n’est pas tout de suite évacué vers la France mais d’abord tout au Nord de la Russie, dans la région de Mourmansk, sous le cercle polaire, puis il sera envoyé dans l’extrême Nord de la Norvège, où des prisonniers russes libérés «ne paraissent pas enchantés de rentrer au pays» (26). Ses quelques mois passés dans le grand Nord l’enchantent, il s’extasie devant d’énormes rochers («on se croirait sur une autre planète», 24), participe à une pêche à la morue (25)... Enfin un bateau le reconduira, avec des compatriotes, vers Edimbourg, en Ecosse, puis Le Havre (27), et il sera de retour à Villeneuve en septembre 1945 (28). Périple peu banal, pour un petit campagnard charentais.

jeudi 4 juillet 2024

loriot

Il est un peu râlant de travailler quasi chaque jour une paire d’heures dans des bois où l’on entend sans cesse le chant des loriots, bref et sobre, deux trois notes flûtées qui résonnent dans le silence des arbres, et de ne jamais voir la jolie volaille, qui reste planquée dans les cimes, mais j’ai fini par en apercevoir un l’autre jour, alors que je zonais en lisière, l’un d’eux est sorti du bois comme une flèche pour gagner un autre massif en volant droit au-dessus des champs. Ce fut bref, mais enfin.

mercredi 3 juillet 2024

Biocca

La semaine dernière j’ai créé ma vingt-troisième notice dans Wikipédia, celle-ci portant sur l’ethnologue italien Ettore Biocca, auteur ou co-auteur du best-seller Yanoama, récit d’une femme brésilienne enlevée par les Indiens. Je comblais ainsi une étrange lacune, car s’il existe une notice consacrée à ce livre dans les Wiki en anglais et en japonais, il n’y en avait aucune sur l’auteur lui-même, dans aucune langue. Ma notice comporte essentiellement une esquisse biographique (à partir de données trouvées en ligne, parmi lesquelles j’étais bien étonné d’apprendre les convictions  pro-soviétiques du personnage) et une analyse de la réception de l’ouvrage en France, où il a suscité la controverse principalement sur deux points : Biocca s’attribue-t-il abusivement la paternité d’un récit dont il n’est que le co-auteur (ce dont on peut toujours discuter, mais il s’en défend assez bien) et la part de la violence est-elle exagérée (en tout cas les brutalités rapportées cadrent mal avec le bon-sauvagisme en vogue chez les anthropologues). Ce petit travail m’a rappelé bien des souvenirs, car Yanoama fut une des grandes lectures initiatiques de ma jeunesse, et les noms des ethnologues polémistes m’étaient familiers (Pierre Clastres, Robert Jaulin et surtout Jacques Lizot, avec qui j’ai correspondu ado, je possède encore le frêle tiré à part dédicacé de son article de Critique...).