Le blog littéraire et agricole de Philippe Billé. Des notes de lecture, et des notes du reste.
mardi 2 décembre 2025
Knivet
Bien que n’ayant toujours pas l’intention d’étudier le récit du voyage d’Anthony Knivet, que je n’arrive déjà pas à lire, je viens de feuilleter par curiosité la bonne réédition du texte original, publiée par un certain Vivien Kogut Lessa de Sá aux presses de l’université de Cambridge en 2015, The admirable adventures and strange fortunes of Master Anthony Knivet : an English pirate in sixteenth-century Brazil. En parcourant l’appareil critique, deux remarques m’ont intéressé. Tout d’abord la constatation (p 201) qu’au contraire de tous les autres chroniqueurs du Brésil de l’époque, Knivet est le seul à rester totalement muet sur la question de l’anthropophagie, bien qu’il ait lui-même vécu chez des Indiens qui la pratiquaient. Ce «striking silence» lui enlève encore de l’attrait à mes yeux. Par ailleurs la mention (p 210) de sa réaction quand, vivant chez les Tamoio, ceux-ci lui proposent des femmes : Je refusai, expliquant qu’il n’était pas de notre usage de prendre femme hors de notre pays. L’argument n’était sans doute qu’un prétexte, mais quelle était la vraie raison du refus ? Ce rude gaillard n’étant pas excessivement scrupuleux, je doute qu’il ait été choqué par une pratique abusive. Alors, quoi ? Les femmes qu’on lui proposait étaient-elles moches ? Ou n’avait-il tout simplement pas le goût des filles, comme il arrive ? En tout cas l’anecdote me parait significative, une fois de plus, du statut peu enviable de la femme dans ce genre de société primitive : équivalent à peu près à celui d’une esclave ou d’un animal domestique que l’on prend, que l’on donne, que l’on prête, que l’on vole, que l’on échange sans lui demander son avis, qui est là pour servir, obéir et se taire. Les indigènes se réclamant aujourd’hui de leur héritage culturel restent discrets sur ce point.
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