lundi 11 mars 2024

cyprès

Un de mes travaux intermittents ces jours-ci consiste à mettre en pièces un arbre que j’ai dû abattre dans mon jardin. C’était mon seul cyprès, planté près du portail il y a une quinzaine d’années. Il était alors moins haut que moi. Une fois, quelques années plus tard, quand il mesurait déjà trois quatre mètres, un coup de vent l’a poussé, il s’est affalé en biais contre le toit du hangar, à deux mètres de là. Je l’ai redressé et tuteuré ou haubanné quelque temps, en me disant que si cette mésaventure se reproduisait, je le supprimerais. Il a tenu bon, bien droit pendant des années. Dernièrement il s’élevait jusqu’à plus de huit mètres et formait un beau duo de gardiens méridionaux avec le laurier, qui pousse de l’autre côté du portail. Cet automne il a souffert d’une tempête, qui l’a très légèrement mais visiblement penché. Et voilà que le mois dernier, en rentrant de Gironde alors qu’il y avait encore eu tempête pendant la nuit, je l’ai retrouvé très incliné, à l’aplomb au-dessus du coin du hangar. Les vents dominants ici soufflent de l’ouest ou du sud-ouest, mais vu l’orientation de l’arbre, le coup fatal est venu du nord-ouest. Impossible de redresser un spécimen de cette dimension, et si c’était possible cela serait vain, il resterait promis à de nouveaux assauts. Restait à le couper. J’ai laissé passer quelques jours pour songer à la question, hésitant à chercher l’aide d’un bûcheron, puis j’ai décidé d’opérer moi-même. Après avoir dénudé le tronc sur un mètre de haut pour y voir plus clair, j’ai appliqué ma scie au niveau le plus pratique, à quatre-vingt centimètres du sol. Le tronc était large d’une quinzaine de centimètres à cette hauteur et je l’ai assez facilement scié jusqu’aux deux tiers, quand il s’est affaissé sur le toit du hangar un peu plus brutalement que je n’aurais pensé, mais en n’y cassant que deux tuiles. A ce moment par coïncidence sont passés dans la rue mon voisin Maurice, qui m’a prêté une scie électrique, et l’ami Cyril, qui m’a aidé à finir de scier l’arbre et à le faire tomber au sol, où il git depuis une dizaine de jours. Il interdirait l’entrée de véhicules par le portail, si le portail n’était de toute façon maintenu fermé depuis le début de l’année, les pluies ayant rendu le jardin trop boueux pour que j'y gare ma voiture automobile. Il y a là peut-être une leçon : les cyprès sont faits pour pousser en terrain méditerranéen sec et pierreux, non dans de l’argile molle et gorgée d’eau. Je n’essaierai pas d’en planter un autre. Celui-ci faisait de temps en temps des petits, qui poussaient dans les interstices du dallage à proximité. Des quelques pousses que j’ai essayé de récupérer, toutes ont périclité sauf une, qui a donné une belle tige de quarante centimètres. Je l’ai plantée l’an dernier en lisière d’une parcelle dans les collines, on verra bien ce qu’elle donne. En attendant, aux moments où il ne pleut pas et où je n’ai rien de plus urgent, je coupe toutes les branches du cyprès tombé, les plus fines au sécateur, les plus grosses à la scie. Puis je les recoupe en morceaux assez petits pour les entasser dans mes bacs en plastique et les emporter à la déchette. Je n’ai pas de remorque et n’en voudrais pas, mais je peux placer trois bacs sur la banquette arrière et un quatrième dans le coffre. J’ai déjà fait cinq ou six voyages, le prochain devrait être le dernier, j’arrive au bout. Débiter un cyprès est pour moi un travail inhabituel. Je suis étonné par la densité de ce tronc solide, que je conserverai à toute fin, et par la lourdeur du feuillage très dense. L’arbre est garni de cônes sphériques innombrables, assurément plus de mille, les uns neufs et compacts, les autres secs et craquelés, j’en ai gardé un petit tas. Quand je manipule les branches, elles dégagent un pollen jaune qui s’envole en poussière. Ici et là je trouve un nid en ruine, fait de branchettes ou de mousse. Je me souviendrai de ce long chantier.



1 commentaire:

  1. Bienvenue au club ! Le 22 février dernier, un coup de vent violent (sud sud-est) d'une durée de 6 minutes chrono a jeté bas deux grands frênes du jardin, asticotant au passage une toiture et un escalier puis chiffonnant une rambarde. S'en est suivi le passage de l'assureur, de l'expert, du couvreur pour bâcher la toiture, puis des artisans pour dresser des devis. Et maintenant, les deux cours d'eau marient leurs eaux juste chez nous ont décidé de vagabonder hors de leur lit. Vous me direz, si on n'est pas contents, on n'a qu'à pas habiter dans un moulin et aller se faire pendre en haut d'une colline…
    F. Grenand

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