lundi 22 avril 2024

monologues

La grande vertu des Monologues du vagin (Balland, 1999, édition originale américaine The vagina monologues, 1998) c’est la brièveté. L’écrivaine Eve Ensler a su se contenter d’une centaine de pages, ventilées en courts chapitres, c’est bien assez. Ce pamphlet féministe tient à la fois de l’essai et du théâtre, les textes étant destinés à être lus sur scène. Il s’agit d’une célébration du sexe féminin, que l’on examine sous toutes les coutures et sous une lumière crue, et que l’on s’efforce de glorifier. Eve pense ainsi œuvrer à la «libération» des femmes, terriblement opprimées par l’ordre patriarcal des vilains hommes, qui sont très méchants. Le choix du terme Monologues me paraît discutable : il peut s’appliquer à certains des textes (développements de l’auteuse, transcription ou adaptation des propos de telle ou telle autre femme) mais enfin il rend mal compte du fait que l’ouvrage est essentiellement polyphonique, et plusieurs des chapitres sont des collections de réponses à des questions, ces voix multiples étant tout le contraire de monologues. Il y a là des Discours ou des Variations, plutôt que des monologues. Quant au thème du Vagin, est-il si libérateur, et si passionnant ? On sent bien là l’obsession des femmes féministes qui n’en peuvent plus de se trouver formidables, et dont on devine que le deuxième organe préféré doit être le Nombril. Je pense qu’il ne serait pas plus appétissant de composer pareillement des Tirades du pénis, ou des Soliloques du trou du cul. Il ne faut peut-être pas avoir honte de ce que nous soyons des êtres biologiques, mais je crois qu’il n’y a pas non plus matière à s’en vanter. Quant aux particularités de la biologie féminine, les féministes seraient bien avisées d’admettre que les hommes n’y sont pour rien. (Par comparaison je relisais naguère les méditations autrement graves d’un Caraco sur le sujet, dans son Post mortem : «La menstruation, la grossesse et l’accouchement, et la lactation, nous ne pouvons glorifier de telles servitudes, elles sont dégoûtantes et nombre d’hommes en frémissent, bien qu’ils n’étalent l’horreur qu’ils éprouvent, de peur de passer pour des monstres. Les hommes amoureux affectent de les oublier, les autres gardent le silence, c’est un sujet que l’on élude et qui nous peine tous ...»). Enfin l’aspect le plus pénible des dits Monologues, c’est la niaiserie souvent avec laquelle le sujet est traité. Alors que certains chapitres observent une certaine justesse de ton (le meilleur à mon avis est celui recueillant des témoignages sur les premières règles, pages 55-60), d’autres sombrent dans un mauvais goût de très bas niveau. Les pires sont les trois compilant de multiples réponses à ces trois questions : Comment habilleriez-vous votre vagin (p 39-40) ? Si votre vagin pouvait parler, en deux mots, que dirait-il (p 41-42) ? enfin Qu’évoque pour vous l’odeur d’un vagin (p 93-94) ? Inutile de préciser que les réponses rivalisent de ridicule avec les questions, je laisse aux curieux le plaisir de découvrir ces perles. Un détail social m’a frappé, page 28, quand Eve évoque ses vastes recherches : «J’ai parlé avec plus de deux cents femmes ... Elles étaient professeurs, actrices, cadres, professionnelles du sexe ...» Ces dernières sont naturellement des opprimées de choix, en quelque sorte estampillées, mais les trois premières professions citées sont celles de milieux plutôt aisés, et surtout très réceptifs aux idéologies dites progressistes. Par contre zéro prolo, zéro paysanne, zéro petite employée. Malgré quoi cette œuvre larmoyante est un best seller international et des millions de dindes, de dindons et de dindonneaux ont applaudi le spectacle ou acheté le livret dans le monde entier. Ce succès immense dément d’ailleurs l’idée que la voix des femmes serait étouffée. En France il paraît que le texte a été lu à Bobino par les politiciennes humanistes Roselyne Bachelot, Myriam El Khomri et Marlène Schiappa, qui ont bien la tête à ça, en effet.

1 commentaire:

  1. → Martin Page : Le livre : Au-delà de la pénétration, un manifeste bref et percutant sur les rapports de genre !!! (https://www.lenouvelattila.fr/au-dela-de-la-penetration/)

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