Dans la banlieue de Bordeaux, au sud de la commune de Canéjan, au bord de la route de Bayonne, se trouve un bien nommé Lac Vert, créé il y a une trentaine d’années dans une carrière désaffectée. On peut y pratiquer la pêche, mais l’activité principale des visiteurs consiste à faire le tour du lac en marchant ou en courant, ce qui représente un circuit d’environ un kilomètre. On peut aussi emprunter un sentier forestier rectiligne partant du nord du lac en direction du nord-ouest. Au bout de deux ou trois cents mètres, ce sentier débouche sur une petite route bitumée, dite chemin de Camparian, menant à droite vers le bourg de Canéjan, à gauche vers Cestas. Lorsqu’on parcourt ce sentier forestier, on peut constater que les arbres poussant de part et d’autre sont principalement des houx. On traverse là une houssaie, un holly wood. Quand on va du lac vers le chemin de Camparian, on trouve à main droite, une vingtaine de mètres avant d’arriver à la route, un pied de houx d’une taille exceptionnelle. A vue d’œil il doit faire entre dix et quinze mètres de haut et l’on peut voir que la cime semble morte. Mais il étonne surtout par sa corpulence. J’ai mesuré le tronc à hauteur d’homme : la circonférence est de 2,20 mètres, ce qui donne un diamètre d’environ 70 centimètres, mensurations hors du commun pour cette espèce (Ilex aquifolium). J’indiquerai ici un autre itinéraire, si l’on veut rendre visite à cet arbre : partir de Canéjan vers Cestas par la petite route dite chemin de Camparian, se garer lorsqu’on trouve sur la droite la maison de repos l’Ajoncière, peu après s’ouvre sur la gauche le sentier forestier, où l’on trouvera à main gauche, à une vingtaine de mètres, ledit pied de houx. J’avais découvert ce géant il y a vingt ou vingt-cinq ans, lors d’une de mes premières promenades dans ces parages, où m’avait guidé mon coach. A l’époque j’ai voulu signaler ce spécimen à l’association ARBRES (acronyme d’Arbres Remarquables : Bilan, Recherche, Études et Sauvegarde). Cette association créée dans les années 90 repère et recense des arbres de France remarquables par leur grand âge, leur grande taille ou quelque autre qualité notable. Avec l’accord du propriétaire, elle attribue à l’arbre un label sans valeur juridique, mais qui contribue à la protection du spécimen en lui assurant un minimum de notoriété. Il me semble qu’alors, c’était avant l’usage du courrier électronique, on m’a communiqué l’adresse d’un ou deux correspondants départementaux, à qui j’ai écrit mais dont je n’ai pas eu de réponse, et je n’ai pas insisté. Depuis, évoquant parfois le cas en discutant avec des amateurs d’arbres, j’ai régulièrement songé recontacter l’asso, et je m’y suis enfin décidé au mois d’avril de cette année. On a répondu laconiquement à mon mail en m’envoyant un formulaire à remplir. C’est à cette occasion que j’ai pris la peine de mesurer l’épaisseur du tronc. En mai, un responsable m’a téléphoné de Bretagne, très aimable, jugeant le cas digne de labellisation. Restait à savoir ce qu’en dirait le propriétaire, en l’occurrence la commune, l’arbre se trouvant dans l’espace public. Elle réagit très froidement. Après quelques mails et coups de fil, on me fit savoir en juin que les autorités locales avaient connaissance de l'arbre, avaient pris des dispositions pour le protéger, et ne souhaitaient pas traiter avec l’association, à laquelle je transmis ce piètre résultat. Mon correspondant de Bretagne avoua redouter que ce houx ne reste un «arbre remarquable caché». Peu après, un mail du siège national m’informait que l’on ne s’intéressait plus à ce candidat. Eh bien, j’aurai entrepris cette démarche en vain. L’essentiel est que cet arbre ne semble pas menacé. Et puis, cela m’a donné la matière pour une note de journal...
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