lundi 30 juin 2025

Zulmira

    Les Máximas inéditas de Tia Zulmira (Editora Codecri, Rio de Janeiro, 1976) sont une oeuvre du journaliste et humoriste brésilien Sérgio Porto (1923-1968) parue posthumément sous son pseudonyme Stanislaw Ponte Preta. J’ai lu en entier ce mince volume sans y trouver une seule maxime à mon goût. On y remarque au mieux quelques définitions métaphoriques à la Gómez de la Serna, ainsi (je traduis) «Le colibri est l’hélicoptère de Dieu» (p 55) ou «Le pharmacien est le sergent de la médecine» (p 73). Le reste est ricanement soixante-huitard (genre «Le policier est toujours suspect», p 48) sans grand intérêt.

dimanche 29 juin 2025

Sagan

    Il est toujours délicat de parler d’un livre qui vous a plu un peu mais sans plus, ainsi du Avec mon meilleur souvenir, de Françoise Sagan (Gallimard, 1984). N’étant guère porté sur la fiction et n’ayant jamais lu de roman de Sagan, je gardais depuis quelques mois sous le coude ce recueil de fragments autobiographiques, légué je crois par Fred R. Le volume est solidement charpenté en dix chapitres, dont cinq portant sur des artistes que l’auteuse a connus (B Holiday, T Williams, O Welles, R Noureev, J-P Sartre), alternant avec cinq autres sur divers sujets (Le jeu, La vitesse, Le théâtre, Saint-Tropez, Lectures). On y retrouve plus en détail ce que la rumeur nous avait déjà vaguement fait savoir sur le personnage de cette écrivaine joueuse, bohème, bambocheuse, etc. Son univers ne m’attire guère mais le texte se laisse lire parce qu’il est écrit avec soin, sans façons (on ne compte pas les formules du genre C’était en telle ou telle année, je ne sais plus bien) et semble-t-il avec sincérité. Sagan a quand même réussi à m’attendrir momentanément sur le vieux Sartre presque aveugle, qu’elle aide à manger au restaurant, ce n’est pas rien.

vendredi 27 juin 2025

Madrid

    Avec un peu de retard, j'ai déposé sur Facebook un album réunissant une vingtaine de photos prises durant mon séjour à Madrid le mois dernier. Voir ici.

lundi 23 juin 2025

Vilain

    Ayant lu par hasard il y a quelques mois et n’ayant pas détesté le petit livre Le jeune homme, dans lequel Annie Ernaux raconte sa liaison pendant un lustre avec un homme beaucoup plus jeune qu’elle, puis ayant appris que celui-ci, Philippe Vilain, venait à son tour de publier un ouvrage où il expose sa version des faits, Mauvais élève (R Laffont, 2025), j’étais curieux de le lire et je viens de l’emprunter. A cette occasion j’apprends qu’en fait l’écrivaine a évoqué l’idylle dans deux autres livres, et que de même l’ancien amant l’a déjà représentée dans deux romans avant de publier cet essai autobiographique. A vrai dire Annie Ernaux n’apparait qu’au bout d’une centaine de pages, dans ce récit plus globalement consacré à décrire la métamorphose intellectuelle de l’auteur depuis son adolescence. Au départ marginal délinquant illettré, fils de prolo alcoolique, il a peu à peu pris goût aux études et à la littérature, notamment sous l’influence de cette maitresse providentielle, à laquelle il a fini par consacrer une thèse de doctorat. Je dois avouer que ce livre m’a un peu déçu, je l’ai trouvé intéressant mais souvent ennuyeux, notamment dans cette première centaine de pages que je n’ai pu lire avec soin, me contentant de la survoler. On est content pour lui que l’auteur ait appris à écrire correctement, mais cela ne suffit pas à produire un texte captivant. Il faut dire que non seulement la matière (une existence médiocre dans un milieu médiocre) est ingrate, mais qu’en outre elle est traitée sur le ton besogneux de la soso, la sociologie socialiste. C’est qu’Annie comme Philippe, et celui-ci sans doute à cause de celle-là, sont imbibés d’idéologie balourde, fiers de défiler avec Krivine et Laguiller ou de «tuteurer un sans-papier algérien désireux de se marier avec une Française» (page 161). Obsédés par la classe sociale, ils voient partout du privilège et de l’oppression, de l’héritage et de la distinction. Ils vivent dans un monde sans surprise, où tout est déterminé, et voient les gens autour d’eux comme des personnages pour lesquels, dirait Davila, «la psychologie est de trop, la sociologie suffit». Fort heureusement la vie réelle ne se déroule pas exactement comme dans les bourdieuseries et Vilain admet que sa propre trajectoire est un contre-exemple du déterminisme marxiste. Dans l’analyse de ses rapports avec Annie, il observe au moins deux malentendus. D’une part elle prétend retrouver en lui son modeste milieu d’origine, mais lui voit bien qu’elle est issue d’un milieu pas si modeste que ça, et socialement supérieur au sous-prolétariat dont lui procède (« nous ne provenions pas du même milieu modeste … Un monde séparait nos milieux modestes », 120-121). D’autre part il pense qu’ils étaient attachés l’un à l’autre de façon asymétrique, par des penchants différents («je devinais que le passionné de littérature que j’étais l’attirait moins que mon corps», 115). En tout cas elle semble avoir été très amoureuse, et l’être restée y compris après avoir rompu avec lui. La seule scène vraiment émouvante du livre est celle où, un an après la séparation, elle demande à le revoir et tente de renouer (223 sq). Mais c’est trop tard, car il est maintenant engagé dans une autre relation, et elle a du mal à l’accepter. Accessoirement je me suis trouvé un petit sujet de méditation à un moment où l’auteur, pour montrer qu’Annie est sérieusement embourgeoisée, évoque le rituel compliqué des repas : «j’étais chargé de dresser la table, d’allumer les chandelles, de choisir la musique classique qui servirait de fond sonore, et je me trompais toujours de côté en plaçant les couverts, je confondais les fourchettes à entrée avec celles à plat ou à dessert, les couteaux, les cuillères, les multiples verres, les assiettes … » (164-165). Pour ma part je me dis que si vraiment c’est un privilège, que d’avoir à se colleter avec de multiples verres et couverts, j’aime autant m'en passer… 

dimanche 22 juin 2025

abc

VITAMINE A

Poème-liste, sur une idée

de Christophe Petchanatz


Vitamine A

Plan B

Vitamine C

Système D

Vitamine E

Point G

Heure H

Génération I

Jour J

Vitamine K

Taille L

Taille M

Quantité N

Groupe O

Point P

Source Q

Valeur R

Taille S

Ford T

Super U

Rayon X

Chromosome Y

Série Z

samedi 21 juin 2025

Angérien

    Mais je ne dois pas trop me plaindre de la bonne ville de Saint-Jean d'Angély, où l'hebdo L'Angérien libre me gratifie encore d'un copieux article du correspondant local Philippe Tumo, sur cinq colonnes s'il vous plait, à l'occasion de ma réédition du Voyage de Jean Mocquet en Andalousie. Il m'intéresserait de toucher ainsi le public local, à qui je peux vendre de la main à la main sans être soumis au racket postal. Nous verrons ce qu'il en est...

vendredi 20 juin 2025

ophtalmo

    Il y avait longtemps que je n’avais eu affaire à notre remarquable service public de Santé, que le Tiers-Monde entier nous envie. Quand on en a besoin, on est rarement déçu. Ma vue baisse et il faudrait que je consulte. L’autre matin j’appelle l’hôpital. On me passe le service d’ophtalmologie, où une dame excédée me dit qu’elle ne m’entend pas car il y a trop de monde et de bruit dans son bureau, et qu’il faut que je rappelle plus tard. Je rappelle l’hôpital en début d’après-midi. La standardiste m’informe alors qu’aucun appel n’est transmis l’après-midi. Je commence à pressentir que je n’ai pas le cul sorti des ronces. Le lendemain matin, je rappelle l’hôpital. La standardiste me repasse le service d’ophtalmo, où le téléphone sonne indéfiniment sans que personne réponde. Je raccroche et rappelle la standardiste, qui cette fois a l’idée de m’informer du numéro où je peux appeler le service directement. Je le fais. Personne ne répond. Je le refais un peu plus tard. Toujours pareil. A la troisième tentative une dame décroche et me prie d’attendre. Je l’entends discuter avec des patients, fixer des rendez-vous. Enfin elle revient me demander ce que je veux. Un rendez-vous pour consulter. Il y en a de deux sortes, m’explique-t-elle : des rendez-vous privés pour lesquels il faut payer un supplément, et des publics mais pour ceux-ci tout est complet jusqu’à fin août. Eh bien, lui dis-je, donnez-moi un rendez-vous en septembre. C’est impossible, elle n’a pas encore le planning pour cette période. Rappelez plus tard. Quand ça ? A la mi-août, me dit-elle. Bon. Nous verrons. Je soupçonne qu’à ce moment-là il me faudra encore appeler dix fois avant de m’entendre dire que tout est complet jusqu’à la fin de l’année. Un jour, je consulterai peut-être un ophtalmologue. Et ce sera peut-être à l’hôpital de cette belle ville. Mais pour l’instant, rien n’est assuré.

jeudi 19 juin 2025

Eno

Mon compositeur bien-aimé Brian Eno a réalisé cette année deux albums en collaboration avec une certaine Beatie Wolfe. Ce sont en quelque sorte des disques jumeaux, semblables par leur titre et par leur habillage. Dans l’un d’eux, Lateral, tous les morceaux s’intitulent Big empty country (I, II, III etc). Ils se ressemblent et se succèdent comme une seule longue oeuvre quasiment ininterrompue. C’est de la bonne vieille ambient music, pas très différente des précédentes productions d’Eno, et pas désagréable. L’autre album, Luminal, est composé de grandes chansons mollasses que je n’ai pas écoutées jusqu’au bout.

mercredi 18 juin 2025

index

    Parcourant l’index de mon Journal, que je viens de mettre à jour, je remarque cette bizarre succession d’entrées, à la fin de la lettre P : Punk … Purisme … Putes … Quel éclectisme !

mardi 17 juin 2025

anti-fascisme

    Curieuse évolution du vocabulaire politique, si l’on en juge par exemple aux campagnes répétées de «barrage anti-populiste» en France, à la mauvaise réputation des référendums, ou à l’opposition virulente à l’élection de Donald Trump en Amérique : être «fasciste», aujourd’hui, consiste à accepter la volonté majoritaire exprimée par le suffrage universel, être «anti-fasciste» consiste à la refuser…

lundi 16 juin 2025

dimanche 15 juin 2025

entomologie

    L’existence indéniable d’un capitalisme sauvage, n’empêche aucunement l’existence d’un capitalisme civilisé. Et la possibilité d’un socialisme convenable ne doit pas faire oublier les horreurs du socialisme barbare.

samedi 14 juin 2025

lecture


Ce soir à partir de 17 h 30 je participerai à une séance de lecture en public 
sur le thème de la correspondance, au Moulin à café, le café associatif de Doeuil sur le Mignon. Je lirai une lettre du prince de Ligne à Jean-Jacques Rousseau datée de 1770. L'auteur y propose gentiment au philosophe de l'héberger.

vendredi 13 juin 2025

guerre

    L’écrivain colombien Orlando Mejía Rivera a publié en 1998? un roman au beau titre, Pensamientos de guerra, qui a été traduit en français en 2004 (Pensées de guerre, chez Mille et une nuits). La bibli disposait des deux versions mais je me suis paresseusement contenté de lire la française. Ce livre m’a beaucoup plu dans les premières pages et beaucoup moins par la suite. Cela commence bien : un professeur de philosophie, spécialiste de Ludwig Wittgenstein, enlevé en plein cours dans une université, est emmené à travers la montagne et la jungle, les poings liés et les yeux bandés, conduit par des rebelles qui l’injurient et le rudoient. Après quoi ses ravisseurs le jettent dans une fosse d’un mètre de large sur trois de profondeur, où il sombre dans la déchéance physique et mentale. Son séjour souterrain est décrit sur huit chapitres, correspondant à huit jours consécutifs, et si j’ai bien compris à la fin il est mort. Il m’a paru invraisemblable qu’il garde tout le temps son bandeau sur les yeux, alors que cela ne sert plus à grand chose une fois qu’il est enfermé, il pourrait très bien se l’enlever lui-même, ou au moins le bandeau devrait finir par se desserrer et tomber tout seul. Au fond de son trou le protagoniste pense à son fils, à sa femme et à Wittgenstein. Les huit chapitres de la détention sont intercalés avec cinq chapitres qui se présentent comme un journal intime du philosophe autrichien gay mais triste pendant les années 1914 à 1918. Mobilisé sur le front, Ludwig craint de mourir, se lamente car il est séparé de son amant David, et rumine des méditations dont le sens m’échappe en partie. La représentation des états d’âme du philosophe et du professeur m’a paru plutôt ennuyeuse. A la fin celui-ci ne sait toujours pas par qui ni pourquoi il a été enlevé et nous non plus. C’est décevant.

jeudi 12 juin 2025

poteau

    Le jeune crétin qui a poignardé à mort une surveillante de collège, hier à Nogent, pour la bonne raison qu’il voulait « tuer une surveillante, n’importe laquelle », et n’a exprimé ensuite aucun regret, ne mérite-t-il pas simplement le poteau ?

mercredi 11 juin 2025

Sevilla

    Deux semaines après le lancement de ma livrette péninsulaire, le Voyage de Jean Mocquet en Andalousie (voir ici), force est de constater qu’il s’agit là d’un non-événement assez réussi, probablement le flop le plus parfait de ma carrière d’éditeur. Mon histoire d'anti-héros n'obtient qu'un anti-succès. A ce jour mes ventes se comptent sur les doigts d’une main, guère plus. Je n’ai pas su trouver le sujet qui emballe. Tant pis. Cet opuscule me plait bien, c’est l’essentiel. Il était un des deux projets auxquels j’ai travaillé parallèlement cet hiver, l’autre étant la causerie sur les vitraux que j’ai donnée en mars. La publication de ce récit de voyage aurait également pu se faire plus tôt mais a été retardée par la recherche d’un imprimeur abordable. Résidant maintenant loin de la civilisation, j’ai d’abord prospecté auprès des entreprises locales. Les quatre devis que j’ai obtenus pour un tirage en cent exemplaires s’élevaient à 192, 264, 341 et 460 euros, ce qui même dans le meilleur des cas était trop cher pour moi. Finalement je me suis retourné vers une imprimerie institutionnelle de la Gironde lointaine, à qui j’avais déjà confié des travaux dans le passé. C’était moins commode à cause de la distance, mais leur tarif inférieur à cent euros était imbattable. A ce prix-là je pouvais m’offrir le plaisir de mettre au monde cette livrette à mon goût, même sans grand espoir de rentrer dans mes frais. Qui plus est, parmi la dizaine d’options du petit nuancier que l’on me proposait pour la couleur de couverture, figurait le jaune «Sevilla intense» au nom prédestiné. Les quelques dizaines d’heures consacrées à préparer le texte et les notes explicatives m’ont permis de passer de bons moments, et parfois de résoudre certains problèmes par des voies providentielles : telle dame, de mes correspondants sur Facebook, ne résidait-elle pas précisément à Cadix, d’où elle a pu me documenter sur tel bâtiment ancien ? et cet ornithologue néerlandais, avec qui j’avais été en contact il y a plus de vingt ans, n’était-il pas tout indiqué pour identifier le nom exact de tel port de Hollande ? Tout cela était bien aimable. Dans mon introduction, très factuelle, je n’ai pas évoqué deux questions que l’on peut se poser en lisant Mocquet, et que j’aborderai ici. D’une part, quelle était sa religion? Il a l’air de s’entendre avec les Hébreux, puisqu’il travaille un temps avec l’un d’eux, qui d’ailleurs l’héberge. Mais il semble ne pas s’étonner des mauvais traitements reçus de cet homme et de ses semblables. Il parait aussi impressionné, peut-être épouvanté, par des manifestations de catholiques fanatiques sur la voie publique. Peut-être était-il protestant, comme on a parfois suggéré. D’autre part, qu’en est-il de sa vie sensuelle ? Etait-il inverti ? C’est incertain mais vraisemblable : les personnages féminins sont quasi absents de son histoire et il fait état plusieurs fois de relations chaleureuses avec des gentilshommes. Mais il ne faut peut-être pas dépouiller ce récit des petits mystères, qui font partie de son charme.

lundi 9 juin 2025

street

Théoriquement, je suis pour toute liberté en art. Devant certains cas concrets, toutefois, j’hésite. Imaginez par exemple qu’un beau matin, vous ouvrez vos fenêtres et découvrez que sur le mur juste en face, le street artist Vincent Glowinski, alias Bonom, Révélation Art Urbain 2018, «l’artiste français qui envoûte les murs de Bruxelles» (France Info) a pris la liberté de peindre une énorme bite (le «pénis de Saint-Gilles») sans vous demander votre avis. Et vous allez maintenant avoir tous les jours cette énorme bouse picturale sous les yeux, ainsi que sous ceux de vos enfants et de vos visiteurs. Etes-vous en effet envoûté ou… Ainsi va la vie, tantôt on se sent d’humeur libérale, tantôt on a envie d’envoyer des baffes…
(Note inspirée par un article sur cette peinture datant de 2016, qui a été effacée deux ans après).

dimanche 8 juin 2025

filiation

    Chaque fois que je réfléchis à cette question, je me dis que je ne vois pas quel système de transmission du nom de famille des parents aux enfants peut ne pas privilégier un sexe ou l’autre. Comment réformer les actuels systèmes de filiation, autrement qu’en passant du patrilinéaire au matrilinéaire, ce qui ne reviendrait qu’à remplacer une injustice par une autre, symétrique ?

jeudi 5 juin 2025

fillette

    En rêve cette nuit j'étais bien embêté, d'avoir perdu dans la foule une petite fille que j'étais chargé de surveiller. J'avais fait sa connaissance peu avant en lui demandant : Quel âge as-tu ? - Cinq heures, m'avait-elle répondu.

mercredi 4 juin 2025

Pensées

Le procédé consistant à extraire des aphorismes qui se trouvaient insérés dans les textes d’un auteur peut paraitre discutable. Pour ma part je le trouve légitime et j’ai tiré profit de recueils d’aphorismes extraits par exemple des oeuvres de Pío Baroja (Lettre documentaire 352) ou de Machado de Assis (Ld 392). Dans le même genre je viens de lire le recueil de 501 pensamentos tirados dos Sermões do Padre Vieira (501 pensées extraites des Sermons du père Antônio Vieira (1608-1697) par le père Gerardo Cabada, sj, Edições Loyola, São Paulo, 2001). J’étais un peu déçu de n’y pas retrouver une fameuse citation du grand prédicateur luso-brésilien, lue je ne sais plus où et jamais oubliée : Le pire, dans les mauvaises habitudes, ce n’est pas qu’elles soient mauvaises, c’est que ce soient des habitudes (O pior, nos maus costumes, não é serem maus, é serem costumes) mais peut-être ne venait-elle pas d’un sermon. Un peu déçu aussi de la teneur assez banalement pieuse de la plupart de ces pensées, banalité que la rhétorique baroque de l’auteur ne suffit pas à rehausser. J’en ai quand même trouvé quelques unes assez à mon goût et j’en traduis onze dans ma Lettre documentaire n° 527.

Vieira

Lettre documentaire 527

ONZE PENSEES du père ANTONIO VIEIRA sj


extraites des 501 pensamentos tirados dos Sermões do Pe Vieira

par G Cabada (Edições Loyola, São Paulo, 2001)

ici traduites du portugais par Philippe Billé.

(On a conservé entre parenthèses leur numéro d’ordre, qui est aléatoire dans le livre, mais on les a replacées en ordre chronologique).


    (320) Là où l’envie règne, les vertus sont des péchés, les mérites sont des fautes, les oeuvres ou les bonnes qualités sont des crimes. - (Sermon du samedi précédant le dimanche de Rameaux, 1634).


    (74) La peste du gouvernement est l’irrésolution. - (Sermon de Saint Pierre, 1644).


    (415) Qui ne demande ne veut savoir, qui ne veut savoir veut se tromper. - (ibidem).


    (133) L’absence est une demi-mort, la prison une demi-sépulture. - (Sermon des obsèques de Dom Duarte, 1649).


    (431) Dans les maladies, le plus grand bienfait que puisse vous apporter qui vous aime, c’est d’être avec vous. - (Sermon de Saint Roch, 1649).


    (348) L’humilité, c’est essentiellement la conscience de sa propre dépendance, de sa propre imperfection, et de sa propre misère. - (Sermon du Mandat, 1655).


    (294) On dit qu’il faut se tenir avec le roi comme avec le feu : ni si près qu’il brûle, ni si loin qu’il ne réchauffe. Mais c’est tout le contraire. Le roi, il faut en être ou très proche ou très éloigné. - (Sermon du quatrième dimanche de Carême, 1657).


    (414) L’âme est comme le soleil, on ne peut la retrouver là où on l’a perdue, mais à l’opposé. Le soleil se perd au couchant mais si vous voulez le retrouver, il faut le chercher à l’orient. - (Sermon de Saint Antoine, 1657).


    (216) Les nations, certaines sont plus blanches, d’autres plus noires, parce que les unes sont plus proches, et les autres plus éloignées du soleil. Peut-il y avoir pire erreur de jugement parmi les hommes, que de croire que je doive être votre seigneur parce que je suis né plus loin du soleil, et que vous deviez être mon esclave parce que vous êtes né plus près ? - (Sermon de l’Epiphanie, 1662).


    (393) Sur la table où l’on joue beaucoup, il manquera bientôt de quoi manger. - (5e Sermon de Saint François-Xavier «éveillé», 1694).


    (392) Le médecin ne soigne pas la pourpre, ni la couronne, mais l’homme nu, le corps qui chez tous est fait de même. - (Sermon de saint Luc, sans date).


mardi 3 juin 2025

néomots

    Mes néomots de ces derniers temps : pyromantisme, retrouvère, communautiste.

lundi 2 juin 2025

désherbage

Désherbage

Mauvaise herbe idéale, qui s’arrache facilement et proprement.

Mauvaise herbe qui s'arrache mieux quand la terre est mouillée.

Mauvaise herbe très envahissante mais qui s’arrache assez facilement.

Mauvaise herbe qu’il faut arracher attentivement pour que les racines viennent bien avec la tige.

Mauvaise herbe qui se casse au ras du sol quand on l’arrache et qui repoussera peut-être depuis la racine.

Mauvaises herbes qu'on arrache d'une main et qu'on entasse dans l'autre.

Mauvaise herbe qu'on laisse pousser quelque temps pour mieux la saisir quand on l'arrachera.

Mauvaise herbe que l’on a laissé trainer après l’avoir arrachée, et qui survit simplement parce que la racine touche le sol.

Mauvaise herbe dont les racines emportent une petite motte de terre à l’arrachage, que l’on fait tomber d’une pichenette.

Mauvaise herbe que l’on n’a pas vu venir et qui soudain pullule, minuscule et innombrable.

Mauvaise herbe dont la racine plus longue que la tige nous étonne.

Mauvaise herbe dont on se demande si elle ne plairait pas aux tortues.

Mauvaise herbe à qui l’on ferait trop d’honneur en la nommant simplement adventice.

Mauvaise herbe qu’on laisse pousser pour sa bonne mine, mais que l’on finit par arracher quand elle devient encombrante.

Mauvaise herbe pas si mauvaise, après tout (il y en a).